Le règlement européen sur les biens à double usage
Pour honorer leurs engagements internationaux au sein des régimes internationaux de contrôle des exportations, les pays de l’Union européenne ont créé un règlement du Conseil instituant les modalités communes et partenariales du contrôle des exportations des biens et technologies à double usage.
Les quatre principaux régimes internationaux de contrôle des exportations de biens à double usage servent de base à la liste de biens et de technologies annexée au Règlement communautaire de l’Union européenne relatif aux biens à double usage.
L’obligation de disposer d’une autorisation d’exporter (licence)
Le règlement (UE) 2021/821 du parlement européen et du conseil du 20 mai 2021 instituant un régime de l’Union de contrôle des exportations, du courtage, de l’assistance technique, du transit et des transferts en ce qui concerne les biens à double usage (refonte) entre en vigueur à compter du 9 septembre 2021. Il se substitue au règlement (CE) 428/2009 (version consolidée au 15 décembre 2020).
Ce règlement s’applique directement et juridiquement à l’ensemble des exportateurs de l’Union européenne.
En application de l’article 3 du règlement, l’exportation hors de l’espace douanier communautaire d’un bien à double usage répondant à l’une au moins des rubriques listées à l’annexe I est soumise à l’obtention d’une autorisation de l’État, après examen rigoureux du produit, de ses utilisations et de sa destination (localisation et utilisateur).
L’article 11 prévoit que le transfert intracommunautaire des biens répondant à l’annexe IV, requiert également une autorisation.
Le commerce de ce type de biens et de technologies est en effet soumis à des contrôles sur pièces comme sur site, assortis de sanctions fiscales et/ou pénales, en cas d’infraction.
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Les définitions essentielles
On retrouve les définitions principales dans l’article 2 du règlement : bien à double usage, exportation, exportateur, assistance technique, courtage, transit, autorisation d’exportation, territoire douanier de l’union européenne…
Quatre types d’autorisations valables dans toute l’Union
L’article 12 introduit les 4 types d’autorisation à la disposition des exportateurs : licence individuelle, licence globale, les licences générales nationales et les autorisations générales de l’Union.
La durée de validité maximale d’une autorisation est limitée à 2 ans. Les autorisations sont valables dans toute l’Union, quel que soit le pays l’ayant délivrée.
Les autorisation générales de l’Union, à privilégier quand cela correspond à vos projets, sont détaillées à l’annexe II du règlement, sections A à H.
> Voir « Choisir la procédure d'autorisation adaptée à son projet »
La classification des technologies soumises : l’annexe I
L'annexe I du règlement contient la liste des biens contrôlés (partie II) ; elle fait l'objet d'une mise à jour annuelle.
Les quatre principaux régimes internationaux de contrôle des exportations de biens à double usage (arrangement de Wassenaar, Groupe Australie, NSG, MTCR) servent de base et de mise à jour automatique de cette liste de biens et de technologies L’annexe I intègre aussi quelques produits chimiques issus d’une liste de la Convention sur les armes chimiques (CIAC).
La partie I de l’annexe I affirme des notes et définitions précisant les notions suivantes :
- Classement d’un système en vertu de son élément principal lui-même classé s’il est détachable,
- Définition de la « technologie » relevant du contrôle,
- Précisions sur les logiciels,
- Acronymes et définitions techniques reprises dans les rubriques.
La partie II constitue l’essentiel du règlement avec près de 300 pages de rubriques, agencées selon une classification complexe, et disposant chacune d’un code formaté.
Élargissement à d’autres technologies : la clause attrape-tout et les arrêtés nationaux
Afin de se prémunir contre le détournement d’usage de biens qui ne seraient pas listés par le règlement européen (dont le cycle de mise à jour n’est pas compatible de la réactivité nécessaire face un risque nouvellement identifié : émergence de nouvelles technologies, ), ce dernier prévoit également une clause dite « attrape-tout » qui permet de soumettre n’importe quel matériel à une autorisation d’exportation, par exemple indépendamment de l’évolution des listes des régimes de contrôle.
C’est à cette fin que l’article 3 prévoit la disposition suivante : « conformément aux articles 4 (risque d’utilisation au service d’armes de destruction massive ou risque de contournement d’un embargo militaire), 5 (biens de cybersurveillance pouvant atteindre aux droits de l’homme), l’exportation vers toutes ou certaines destinations de certains biens à double usage non énumérés à l’annexe I peut également être soumise à autorisation.»
La clause attrape-tout prend la forme d’une décision administrative individuelle dans le sens où elle s’adresse à un exportateur précisément.
Enfin, l’article 9 prévoit que des listes nationales soient prises par un État Membre.
> Méthodologie pour vérifier le classement d’un bien
Décisions souveraines de chaque État et des obligations de consultation entre États membres
L’article 15 du règlement encadre les motifs de refus d’une autorisation d’exporter un bien à double usage.
L’article 16 accorde le droit à l’autorité compétente de suspendre ou annuler une autorisation encore valable.
Les avis rendus sur les demandes d’autorisation d’exportation relèvent de prérogatives de souveraineté de l’État français.
Toutefois, cet acte souverain s'inscrit dans le cadre d'objectifs internationaux auxquels la France a souscrit. Elle n'est maîtresse que des modalités d'application de ces règles sur son propre territoire. Elle doit également informer les autres États Membres de l'UE et ses partenaires des régimes de contrôle internationaux des résultats des procédures qu'elle gère (notification des refus).
Un État tiers peut s'opposer à un projet d'exportation autorisé par la France, si cet État est membre de l'UE et qu'il estime ses intérêts de sécurité menacés. Inversement, dans le cas où un exportateur français projette d'exporter un bien à partir d'un autre État de l'U.E, la France peut s'opposer à la délivrance de la licence par cet autre État et déclencher des consultations.
Articulations avec des règlementations non européennes
Enfin, un État extérieur à l'U.E. contestant le projet d'un exportateur ou d'un transitaire français, dûment autorisés, de faire traverser son territoire par des biens qu'il n'aurait lui-même pas autorisés à l'exportation, peut provoquer des consultations officielles, dans les 15 jours suivant la publication de la licence française ; ces dispositions proviennent des régimes de contrôle et non du Règlement européen.
En revanche s'il s'agit d'une autorisation requise pour des composants d'origine américaine, contrôlés dans le cadre de procédures relevant de la législation interne des États-Unis (E.A.R ou I.T.A.R), l’État français n'est pas partie à ces procédures et n'en est généralement pas informé.
Guides et recommandations d'application
La Commission européenne publie des guides de recommandations à destination des entreprises ou d’autres organismes concernés pour les aider à appliquer la législation européenne sur le contrôle à l’exportation des biens à double usage.
Sont en ligne actuellement :
- un guide relatif aux « Programmes Internes de Conformité » à destination des entreprises permettant d'aider les exportateurs à détecter, à gérer et à atténuer les risques associés au contrôle des échanges de biens à double usage ainsi qu'à assurer la conformité avec la réglementation.
- Un guide à destination des organismes de recherche
Mis à jour le 14/06/2024